Rencontre avec Morgane Tiburce, une des nombreuses bénévoles passionnées de sport outdoor. Elle revient donner de son temps sur l’UTAT, chaque année, depuis près de 6 ans. Comme aimantée par ces paysages somptueux et son majestueux Jbel Toubkal (4 167 mètres), point culminant de l’Afrique du Nord, Morgane nous explique son expérience. Celle-ci va peut-être susciter des vocations.
Un témoignage rare qui fait du bien.
LPT : Morgane, bonjour, peux-tu te présenter à nos lecteurs ?
MT : Je m’appelle Morgane. J’habite à Paris, et je travaille à mon compte. J’ai toujours aimé l’aventure, le sport et la nature. C’est comme ça, par exemple, qu’en août 2008, partie faire fait le tour du Mont Blanc, par hasard j’ai vu passer devant ma tente, celui qui s’avérait être Kylian Jornet, suivi de plus d’un millier de coureurs.
« J’avais parcouru en 1 semaine ce qu’ils allaient parcourir en moins de 48h »!
A l’époque, j’avais été très impressionnée par cette discipline que je ne connaissais pas, ainsi que par l’humilité de ses héros, à l’arrivée.
Plus tard en 2013, je suis allée au Maroc pour faire l’ascension du Jbel Toubkal. Le temps de tomber amoureuse de la région, j’apprends l’existence d’un ultra trail qui s’y déroule depuis plusieurs années, l’UTAT, littéralement l’Ultra Trail Atlas Toubkal !
C’était une évidence :
J’ai tout de suite contacté les organisateurs. Je voulais à la fois retourner là-bas et faire partie de cette aventure ! Les choses furent plus simples que je ne l’imaginais. Quelques échanges de mails et de coups de téléphone, et quelques mois plus tard, j’arrivais sur le beau plateau de l’Oukaimeden.
En 3 minutes, j’avais fait la connaissance d’une joyeuse tablée.
J’appris le lendemain que j’allais monter des antennes radio en haut de cols. On m’informa alors que l’on serait accompagnés de mulets pour le portage, et qu’ensuite je retournerai à Marrakech accueillir des coureurs. Avant de grimper le jour du départ de la course sur un PC de montagne.
J’étais bien entourée, et la somme de nos bonnes énergies m’a piquée pour des années.
Six ans après, j’en fais toujours partie. J’en suis quand même très fière. Maintenant l’Utat fait partie de ma vie. Pour l’édition 2020, je m’investis au fil des mois pour participer à l’organisation des salons trails à travers l’Europe.
Nous allons voyager les amis. On risque bien de se croiser sur plusieurs évènements ! “Pssst… Venez nous voir, pour commencer, sur le salon de la Transgrancanaria :)”
LPT : Que représente le bénévolat pour toi ?
MT : Être bénévole sur cet événement sportif, même si c’est un réel engagement, c’est avant tout pour moi un grand plaisir. De toute façon, c’est donner le meilleur de soi-même. Pour des raisons profondes, qui nous sont propres, la motivation est la clé qui nous anime.
Ici point de rémunération, personne ne compte ses heures non plus. On se paie sur la passion ambiante. Le bénévole se rémunère aussi l’aventure humaine et la réussite d’un événement hors du commun.
LPT : Que fais-tu pendant ces 5 jours de course ?
MT : Je fais partie d’une petite équipe de 4, nous commençons par accueillir pendant 2 jours l’ensemble des coureurs qui arrivent par Marrakech.
Nous sommes souvent leur premier contact sur le sol marocain. La plupart du temps, c’est un moment calme et privilégié pour discuter en attendant les navettes.
Ensuite cela dépend des années, mais au moment du départ de la course, je pars en randonnée, sous les étoiles, pour aller monter le PC de ravitaillement, dans un village qui s’appelle Tachdirt. C’est un authentique village berbère.
Je commence à connaître des gens là-bas à force d’y retourner. Il y a une école, on s’installe à côté, et les enfants sont curieux, ils viennent voir les coureurs passer.
Il y a également le gardien du refuge qui est notre ange gardien quand il y a des imprévus, on peut toujours compter sur lui, comme sur les Berbères qui parcourent la montagne et la connaissent par cœur.
Ensuite, une fois que tous les coureurs sont passés, on démonte et on part sur un autre PC qui est à Imlil.
C’est royal car ce PC est hébergé dans un ravissant hôtel, l’hôtel Soleil qui est une institution là-bas dans le Chamonix de l’Atlas.
PC dans lequel les coureurs peuvent rester pour se restaurer, se reposer, recevoir des soins, faire une caresse aux chats de l’hôtel avant d’entamer les 20 derniers kilomètres.
Après le passage des derniers coureurs, dont l’amplitude se fait sur 15 heures, on attend que tous les PC de montagne arrivent à Imlil.
On vérifie qu’on n’a oublié ni rien ni personne, et on rentre tous ensemble à Oukaimeden pour faire la fête, ou au moins prendre une bonne douche au CAF avant la couscous party !
LPT Si tu devais décrire l’évènement UTAT ?
MT : C’est pour moi difficile de le décrire, si ce n’est à travers mes émotions. Mais il faut s’attendre à du dépaysement et de la technicité !
Il faut savoir que c’est une course en altitude, qui démarre à 2600 m, vous traversez plusieurs cols au-dessus de 3000m, et elle se court en semi-autonomie.
Toute la logistique se fait avec des ressources locales. Nous avons je crois, près de 200 mulets qui sont le moyen de transport le plus pratique ici, voire le seul. Le tracé de l’Utat traverse la région la plus reculée du Haut Atlas. De ce fait, on rencontre des amazighs, qui vivent dans la tradition pastorale.
Ce sont de véritables experts de la montagne. Ils sont éleveurs de chèvres, de moutons, ou bien cultivateurs, de noix, de pommes. Les berbères savent également cultiver de véritables oasis verdoyants, en terrasses, à partir d’une petite source d’eau.
Ils ont mon plus grand respect pour perpétuer ces traditions. C’est aussi grâce à eux que les sentiers sont entretenus. Toutes ces caractéristiques rendent alors l’UTAT incomparable, pour moi c’est mythique !
LPT : Pourquoi, comme beaucoup d’autres bénévoles sur l’UTAT, revenir chaque année sur cet évènement ?
MT : C’est une aventure qui se vit en concentré ;
En 5 jours sur l’Utat, on vit des émotions telles qui sont équivalentes à 6 mois d’une vie. L’Atlas est exigeant, on ne peut pas y faire ce qu’on veut, il faut des experts, il faut s’adapter (logistique communication, transport, sécurité, ravitaillement).
On a aussi beaucoup de temps pour l’amitié, la joie, et les moments simples.
On se sépare au début de la course, on part sur nos PC. Le fil qui nous relie pendant 2 nuits, sous un même ciel envahi d’étoiles, tient à une liaison radio et ses crépitements.
Les bénévoles anticipent le passage des coureurs. Ils font état. On imagine encore les bivouacs des copains, la peur par moment aussi. Enfin les équipes se retrouvent à la fin sur le plateau d’Oukaimeden avec des étoiles plein les yeux, pour un repas tous ensemble.
« Les mines sont fatiguées mais c’est du pur bonheur. »
Les souvenirs nous animent longtemps après être rentrés. Nous restons en contact, et on s’organise pour l’année suivante.
LPT : As-tu des conseils, pour nos lecteurs désireux de se lancer comme bénévole et pourquoi pas sur l’UTAT ?
MT : L’Utat a besoin de bénévoles dans nombre de domaines, que ça soit dans le médical, mais aussi les secours, la logistique, la communication, durant l’année également.
Une chose est sûre, l’esprit d’équipe et le sens du service sont primordiaux. La mission d’un bénévole ne s’arrêtera pas à sa fiche de poste. Il faut être solidaire, que ça soit pour aider un coureur en difficulté, ou trier des cacahuètes !
Si votre profil n’est pas une candidature évidente, sur un tel événement sportif. Si vous êtes vraiment motivé. Mettez toutes les chances de votre côté.
N’ayez aucun regret. Tentez le tout pour le tout. Abattez toutes vos cartes en exprimant vos qualités telles que votre polyvalence, votre sens de l’initiative, votre multilinguisme, vos capacités physiques, vos aptitudes sur les réseaux sociaux. A vous de les nommer.
« Le bénévolat saura vous faire briller dans vos domaines de compétences et vous révéler des aptitudes que vous ignoriez chez vous. »
Merci Morgane de nous avoir accordé un peu de ton temps. La rédaction du P’tit Trailer ne manquera pas de suivre tes nouvelles aventures UTAT mais cette fois-ci, nous t’accompagnerons en courant dans les majestueuses montagnes de l’Atlas.